Ce n’est pas la Covid-19 qui va décimer la population carcérale, mais la faim. Suite à une affaire d’introduction de cannabis au sein de la prison civile de Lomé, les détenus ne reçoivent plus de la nourriture de leurs parents. La situation qui dure depuis une semaine devient insoutenable. Au sein de la prison, il y a également une affaire d’attentat à la pudeur. De jeunes détenus seraient sexuellement abusés par l’un des leurs, nommé responsable.
Depuis plus d’un an, les visites sont interdites à la prison civile de Lomé. Une mesure décidée dans le cadre de la lutte contre la propagation du virus. A l’époque, ce centre de détention avait abrité un cluster et de nombreux détenus ont été diagnostiqués positifs à la covid-19. Avec l’interdiction des visites, les détenus ont bénéficié de l’humanisme des Surveillants de l’administration pénitentiaire (SAP) qui ont accepté de recevoir pour eux les nourritures envoyées par les parents. « Si les SAP avaient refusé de prendre la nourriture que nous apportent nos parents, nous serions morts comme des volailles. Ce ne serait plus le coronavirus qui va nous tuer, mais la faim. Les gens pouvaient devenir des cannibales, en un rien de temps », raconte un ex-détenu.
Ce dernier explique comment l’aide des parents des détenus est vitale pour leur santé physique, mais aussi psychologique. « Sans les parents et leur soutien, de nombreux détenus allaient trépasser parce que c’est un milieu difficile à supporter », assure-t-il.
Mais depuis bientôt une dizaine de jours, la tranquillité relative dont jouissent les détenus est mise à mal, par le fait de certains d’entre eux. La nourriture se fait rare à la prison civile de Lomé et la faim gagne du terrain. En effet, avec l’autorisation accordée aux Surveillants de servir d’intermédiaires entre les détenus et leurs parents pour éviter que les premiers ne meurent de faim, certains y ont trouvé une passerelle pour se faire de l’argent. Ils ne rançonnent pas les autres, mais profitent de la rentrée de la nourriture pour s’improviser trafiquants de drogue.
Il y a une semaine, un SAP a été arrêté pour avoir tenté de faire introduire de la drogue au sein de la prison. « La personne a mis du cannabis dans une boite de lait », indiquent nos sources. Selon les témoignages, le SAP a reçu le « colis » destiné à un détenu. En attendant de l’introduire dans la prison, il l’aurait filé à un de ses collègues qui n’en connaissait pas le contenu. A la découverte du colis, le collègue a donné le nom du véritable porteur qui a été mis aux arrêts. Nous ne savons pas pour l’heure ce qu’il en est du détenu destinataire de la marchandise. Mais une chose est sûre, cette affaire a des répercussions sur les autres détenus.
Et pour cause, depuis cette découverte, les envois de nourriture par les proches des prisonniers ont été suspendus. Une situation que peinent à supporter les détenus. « Les nourritures ne rentrent plus et les gens ont faim. L’épicerie dont nous disposons n’a pas la capacité de nous servir tous. Mais il y a une autre chose très importante dont il faut tenir compte. C’est le fait que la grande majorité des détenus n’a pas les moyens de payer les choses qui se vendent au sein de la prison parce que c’est trop cher. Quand un parent t’envoie la sauce, tu peux gérer ça durant plusieurs jours, c’est largement plus avantageux que l’achat de nourriture au sein de la prison », fait savoir un détenu. « Si l’interdiction de la nourriture continue, la situation va devenir intenable », prévient-il. « Nous supplions l’administration pénitentiaire de lever l’interdiction. Le fait qu’un prisonnier cherche à se faire de l’argent par des moyens détournés ne doit pas rejaillir sur les autres détenus. Quand on arrête un passager avec de la drogue à l’aéroport, l’aéroport n’est pas fermé », avance-t-il en guise de comparaison.
En dehors de la tension qui règne au sein de la prison à cause de la privation de nourriture, des sources nous informent d’une situation indélicate qui se poursuit au sein de ce lieu de détention. Un détenu nommé responsable serait en train de faire subir aux autres des actes sexuels contre nature. « Il appelle les jeunes dans sa cellule et les oblige à se donner à lui. Il les prend par l’anus, de gré ou de force. L’autre fois, un des jeunes s’y est opposé et a réussi à sortir de la cellule. Le problème, c’est que comme il est un responsable, il semble intouchable », déplorent d’autres sources.
La direction de l’administration pénitentiaire et de la réinsertion (DAPR) est-elle au courant de cette affaire de mœurs, mais également de violations des droits humains ?
G.A. (quotidien Liberté)